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L’Express

Incursion ukrainienne à Koursk : cette erreur d’un général russe qui coûte très cher à Moscou

Photo diffusée par l'agence russe Sputnik du président russe Vladimir Poutine (g) lors d'une réunion surl a situation dans la région de Koursk, le 12 août 2024 à Novo-Ogaryovo, près de Moscou




C’est la question qui interroge depuis un peu plus de deux semaines et le début de l’opération ukrainienne dans la région de Koursk : comment l’armée de Kiev a-t-elle pu opérer une telle percée sur le sol russe en seulement quelques jours ? Le tout, en gardant cette opération parfaitement secrète ?Si la grande efficacité des forces ukrainiennes et l’impréparation de l’armée russe font probablement partie des bribes de réponses, le Wall Street Journal a révélé, ce mercredi 21 août, un autre élément, loin d’être négligeable. Il y a quelques mois seulement, le colonel général Alexandre Lapine, chargé de la sécurité de la province de Koursk, a fait le choix de dissoudre le conseil chargé de la protection et de la défense de cette région.Ce conseil réunissait des officiers militaires avec des responsables locaux et régionaux de sécurité, afin de superviser la défense de la région de Koursk, frontalière à l’Ukraine. Mais selon Alexandre Lapine, également chef d’état-major des forces terrestres russes, l’armée disposait à elle seule des forces et des ressources nécessaires pour protéger la province. Une faute de jugement qui s’est avérée lourde de conséquences, tant la percée ukrainienne, à partir du 5 août, s’est avérée rapide et jusqu’ici incontrôlée par les forces russes.Un manque humain et matérielIl est bien sûr impossible de dire si ce conseil aurait réellement pu empêcher l’incursion ukrainienne. Sur le plan humain d’abord, les forces russes ont dû organiser leur première ligne de défense avec une absence totale de soldats aguerris pour ce genre d’affrontements. Un exemple criant reflète cela : la première unité russe rencontrée par l’armée ukrainienne, le 488e régiment de fusiliers motorisés, était quasiment exclusivement composée de conscrits. C’est-à-dire des jeunes soldats russes tout juste engagés dans leur service militaire, mobilisés sur le territoire russe pour compenser les vagues de départs sur le front ukrainien.La situation se répéta dans la très grande majorité des premiers affrontements à Koursk, avec pour conséquence majeure la prise d’une centaine de prisonniers russes par l’armée ukrainienne, les forces de Moscou s’étant très vite rendues sans réellement livrer de résistance. Mais c’est bien Alexandre Lapine qui a décidé de laisser la sécurité de la région aux seules forces armées russes, empêchant ainsi l’intervention rapide des autres unités de sécurité intérieures russes.C’était sans parler du manque d’équipements militaires. Selon Konrad Muzyka, expert militaire de la société polonaise Rochan Consulting auprès du WSJ, alors que l’armée russe aurait dû bénéficier de près de 120 véhicules blindés, dont des chars et des véhicules blindés de transport de troupes, les forces militaires russes en avaient seulement entre 10 et 20. Avec là aussi un appel d’air colossal en raison des besoins toujours plus forts de l’invasion de l’Ukraine, ayant totalement dégarni la défense russe sur son propre sol.Une désorganisation totale de la riposteMais c’est surtout du côté de l’inefficacité de la réponse russe que ce choix d’Alexandre Lapine semble avoir des conséquences. En l’absence d’une instance organisée, les efforts déployés par Moscou pour chasser les troupes ukrainiennes ont jusqu’ici été chaotiques, avec des luttes intestines entre les différentes branches de la défense russe – les forces armées, les services de sécurité (FSB), les gardes frontières, ou encore le bataillon des forces spéciales tchétchènes Akhmat – agissant sans véritable coordination.La suppression de ce conseil de défense fut également décidée de façon unilatérale par Alexandre Lapine dans la foulée de sa nomination à la sécurité de Koursk, en mai dernier. De quoi illustrer les lacunes du commandement militaire russe et sa déconnexion des réalités du terrain. “Le pouvoir très vertical instauré par Poutine va pour l’instant à l’encontre des objectifs russes sur le front. Comme la Russie planifie tout depuis le sommet de son commandement, sa capacité de réponse aux événements inattendus et rapides est incroyablement dégradée, plus personne ne prenant d’initiative sur le terrain”, affirme ainsi auprès du Wall Street Journal William Courtney, ancien diplomate américain.Le colonel général Alexandre Lapine incarne d’ailleurs à lui seul toutes les fractures au sein de l’armée russe. D’abord décoré héros de la fédération de Russie en juillet 2022, il avait ensuite été l’objet de critiques extrêmement virulentes de la part de Ramzan Kadyrov à la suite de revers et d’importantes retraites sur le front, le dirigeant tchétchène l’invitant à aller sur le front pieds nus avec une mitrailleuse légère pour “essuyer sa honte avec du sang”. Si le Kremlin avait gardé sa confiance en Lapine en le nommant chef d’état-major des forces terrestres et en lui ajoutant la charge de la sécurité de la région de Koursk, il est loin d’être garanti que celle-ci durera encore longtemps.



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Publish date : 2024-08-22 15:45:22

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