A l’orée des Jeux olympiques de Paris 2024, la Seine a accueilli dans son lit des personnalités françaises dans le but d’attester que le fleuve était, contre vents et marées, bel et bien conforme aux normes sanitaires. Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports, puis la maire de Paris Anne Hidalgo et Tony Estanguet n’ont pas manqué de s’exhiber, tout d’acryliques vêtus, le temps d’une planche et de quelques mouvements de brasse entre les quais parisiens. Il faut dire qu’outre les 1,5 milliard d’euros investis pour son épuration, le début des Jeux approchait et la Seine n’était toujours pas aux normes pour la baignade. Les fortes pluies d’un printemps humide ne permettaient pas l’assainissement du fleuve, dont la concentration de la bactérie E. Coli dépassait régulièrement les taux réglementaires.Mais l’éclaircie est arrivée début juillet, offrant aux officiels précédemment cités leur moment de jubilation. Tout est bien qui finissait bien. Une victoire sur le fil, ric-rac, à l’image des plus célèbres héros de films, franchissant en roulé-boulé le portail qui, se refermant, les menace d’une mort certaine. Généralement, héros oblige, leur aisance les autorise même à repasser le bras pour récupérer le couvre-chef, tombé pendant l’acrobatie. Mais là, le rideau électrique s’est abattu sur le protagoniste.L’épreuve du triathlon, censée se déroulait ce mardi 30 juillet, a été reportée de 24 heures en raison des fortes pluies de ces derniers jours. L’heure est à l’inquiétude car l’organisation ne pourra pas repousser indéfiniment la compétition. Cette dernière se déroulera, au plus tard, le 2 août. Après, c’est un “duathlon” (course + cyclisme mais sans natation) qui aura lieu, solution choisie dans l’hypothèse où la fumée blanche ne sortirait pas d’ici la date limite. Les embûches françaises font écho à celles d’autres grandes capitales européennes qui n’en sont pas toutes au même point quant à la baignabilité de leur cours d’eau.L’épreuve masculine du triathlon prévue mardi 30 juillet 2024 est reportée à mercredi pour “raisons sanitaires”.La Sprée, interdite par endroits aux BerlinoisUn projet, das Flussbad Berlin, souhaite réhabiliter “un tronçon de 840 mètres du canal de la Spree entre la Schloßplatz” pour en faire un “lieu de détente […] et de présenter une qualité d’eau hygiénique et écologique”.En 2023, la capitale allemande recensait 39 points de baignade, souvent alimentés par les cours d’eau avoisinants, dont la Sprée. Mais ces points d’eau – comme le Müggelsee – sont des plans d’eau profonds. Situés en amont de la métropole – se prémunissant des pollutions industrielles résultant de l’activité économique berlinoise – leur teneur en polluants et bactéries est régulièrement contrôlée. Ce qui n’est pas le cas de la Sprée, serpentant en plein centre de la ville, nous apprend le magazine en ligne tipBerlin.Dans un article, publié en juillet 2023, le quotidien berlinois Berliner Morgenpost informait : “La baignade n’est pas autorisée sur les embarcadères, sous les ponts et dans les écluses. De plus, il est interdit de se baigner dans la Sprée, totalement. C’est une voie navigable fédérale et peu importe l’endroit où l’on se baigne, on peut en être retiré par la police”.Mais un projet, das Flussbad Berlin, souhaite réhabiliter “un tronçon de 840 mètres du canal de la Sprée pour en faire un “lieu de détente […] qui présenterait une qualité d’eau hygiénique et écologique”, toujours selon tipBerlin. Des préparatifs sont en cours depuis 2019 et le projet est soutenu à hauteur de 70 millions d’euros par le Sénat de Berlin.Madrid ne compte pas sur le Manzanares”[Le Manzanares] est une rivière métaphysique, qui n’a d’existence que sous la plume des poètes”, écrivait Miguel de Cervantes, le célèbre auteur espagnol de Don Quichotte.”[Le Manzanares] est une rivière métaphysique, qui n’a d’existence que sous la plume des poètes”, écrivait Miguel de Cervantes, le célèbre auteur espagnol de Don Quichotte. La citation est reprise en 2006 par une tribune de l’écrivain Julio Llamazares dans le quotidien El País. L’héritier de Cervantes souhaitait redorer l’image de ce chétif cours d’eau, long d’à peine 87 kilomètres, qui traverse la capitale espagnole.Tout comme à Berlin, l’autorité madrilène régit les lieux de baignade. Dans la métropole, ils ne sont plus qu’au nombre de quatre. Jusqu’en 2016, le site de la Charca Verde situé en amont du fleuve était accessible. Mais, se situant dans le parc régional de la Cuenca Alta del Manzanares et le parc national de la Sierra de Guadarrama, il n’est plus possible de s’y rendre pour des raisons environnementales.En 2014, le média en ligne 20 minutes s’intéressait au comportement des baigneurs madrilènes qui ne respectaient pas les zones de baignade définies par la collectivité. Le journal s’attardait sur la commune d’El Pardo, en amont de l’agglomération, où les gens venaient se rafraîchir dans les petites eaux du Manzanares. “Là, la rivière a un faible débit, elle transporte une grande quantité de boues et a un aspect brunâtre”, relatait le média.Le Tibre, frère cadet de la SeineLa principale épine dans le pied du Tibre est l’un de ses affluents, l’Aniene, qui traverse la banlieue est de la ville aux sept collines. Cela fait 60 ans que le Tibre (Tevere en italien) n’est plus accessible à la baignade, à une exception près. A chaque premier janvier des téméraires sautent, depuis le pont de Cavour, pour célébrer la nouvelle année. “Avec l’essor économique, les industries à l’intérieur et à l’extérieur de la ville métropolitaine de Rome se développent. C’est à cette époque [dans les années 70] que l’administration introduit la première interdiction de baignade en raison du risque de leptospirose : une maladie infectieuse dont les bactéries avaient contaminé les eaux romaines”, nous apprend le site d’informations sarde, Vistanet.Outre la problématique bactériologique, la principale épine dans le pied du Tibre est l’un de ses affluents, l’Aniene, qui traverse la banlieue est de la ville aux sept collines. “[Il] a été pendant des décennies, et est malheureusement toujours, le collecteur de rejets industriels, souvent non réglementés. Même si les niveaux d’Escherichia coli étaient normaux, je ne me baignerais pas dans une rivière que je sais chimiquement polluée”, rapporte un chercheur de l’Agence régionale pour la protection de l’environnement dans le quotidien La Republicca.Mais Rome a de l’ambition. A l’automne 2023, le maire de la ville, Roberto Gualtieri, déclarait, selon des propos rapportés par La Republicca : “C’est un objectif que nous pouvons nous donner”, la citation est appuyée par une prise de parole de sa conseillère pour l’environnement, Sabrina Alfonsi qui statuait que : “Rétablir la baignabilité du Tibre serait l’aboutissement naturel du travail que nous sommes en train de faire.”La Tamise, un petit temps d’avance”[Le fleuve] a très fort débit et constitue la voie navigable intérieure la plus fréquentée du Royaume-Uni, accueillant plus de 20 000 mouvements de navires et hébergeant plus de 400 événements chaque année”, avance l’autorité portuaire.La Tamise (Thames en anglais) ne jouit pas d’une réputation de fleuve propre. Cela est probablement à mettre sur le dos de la révolution industrielle. Au milieu du XIXe siècle, elle est même renommée la “Grande puanteur”, tant s’y déversaient tous les égouts de la ville. En avril dernier, à l’occasion de la traditionnelle course d’embarcations qui oppose les universités d’Oxford et de Cambridge, la décision a été prise de ne pas jeter les vainqueurs à l’eau comme il se fait habituellement. Pourquoi ? Un prélèvement fait d’état d’une trop forte concentration de la bactérie E. Coli.Pourtant, la Tamise est – parmi les fleuves cités précédemment – la seule a disposé d’une zone de baignade en centre-ville. L’Autorité portuaire londonienne – Port London Authority – la délimite en amont du Putney Bridge jusqu’à la commune de Teddington. Mais elle déconseille la baignade car le fleuve a la particularité d’être soumis aux marées en raison de sa proximité avec la mer du Nord. “[Le fleuve] a très fort débit et constitue la voie navigable intérieure la plus fréquentée du Royaume-Uni, accueillant plus de 20 000 mouvements de navires et hébergeant plus de 400 événements chaque année”, avance l’autorité portuaire.Sadiq Khan, le maire de Londres, a annoncé en avril dernier un plan s’étalant sur une décennie pour rendre le fleuve “plus sûr”. Ce projet devra traiter de la problématique posée par la société Thames Water, chargée de la distribution de l’eau et du traitement des eaux usées dans la région. “Les déversements d’eaux usées ont été multipliés par cinq au cours de l’année dernière, plaçant l’entreprise à l’avant-garde d’un scandale national et d’un examen minutieux – tout en gérant ses revenus, puisque endettée à hauteur de 15 milliards de livres”, rapporte le média en ligne Thred.En attendant, la ville pourra compter cet été sur le tunnel Tideway, chargé de relier 34 collecteurs de pluie et égouts vers un centre de traitement dans l’est de Londres. Sa construction a coûté plus de 5 milliards de livres sterling. Il aura pour mission de réduire la quantité d’eaux usées brutes déversées dans la Tamise.
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Publish date : 2024-07-31 06:08:20
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