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L’Express

François Bayrou : où se termine la patience, où commence l’immobilisme ?

Le Premier ministre François Bayrou après son discours de politique générale à l'Assemblée nationale à Paris le 14 janvier 2025




“Il faut les enfermer !”, répétait François Bayrou en privé ces derniers jours en songeant aux organisations patronales et syndicales qu’il voulait contraindre : contraindre à travailler jusqu’à trouver un accord sur les retraites. Dans sa déclaration de politique générale prononcée mardi, cela a abouti au terme de “conclave”, qui ne dépareille pas chez un homme à la culture catholique développée.Le temps limité, c’est pour les autres. François Bayrou, lui, déteste de se voir imposer un calendrier. Sa réputation le précède : l’homme qui ne porte jamais de montre avait même la fâcheuse habitude, lorsqu’il était ministre de l’Education entre 1993 et 1997 et si l’on en croit les mauvaises langues de l’époque, de patienter dans son bureau pour être certain de commencer ses rendez-vous en retard. Et montrer à ses interlocuteurs qu’il était ainsi le maître du temps. Le pouvoir, c’est disposer du temps des autres.Le Béarnais a tellement attendu avant d’être Premier ministre qu’il n’a pas l’intention de jouer l’homme pressé de Paul Morand. “A quoi bon ?” Concertations, discussions, consultations, négociations : François Bayrou ne se perd dans aucune rime qui lui redonne un minimum d’oxygène, au risque de rester flou, notamment sur la construction du nouveau budget. Car il veut demeurer fidèle à la seule personne qui compte vraiment : lui-même. En cela la DPG lui ressemble, qui lui a permis d’évoquer – longuement, lentement – ce en quoi il croit, au-delà d’une situation politique qui lui échappe.Gagner du temps, y compris avec Emmanuel Macron. En milieu de semaine dernière, le président fait savoir qu’il veut organiser le jeudi 9 janvier une réunion à l’Elysée avec les ministres concernés par le dossier des retraites, histoire de montrer que le sujet lui tient à cœur et qu’il entend bien rester incontournable. François Bayrou obtient de décaler le rendez-vous au lendemain. C’est qu’il veut garder la main, face au chef de l’Etat et au sein de son gouvernement. Le 8 janvier, le ministre de l’Economie Eric Lombard a poussé loin le bouchon avec la gauche, qui est ressortie ravie de ses agapes et convaincue d’obtenir gain de cause sur la suspension de la réforme des retraites. Pendant ce temps, la ministre du Travail Catherine Vautrin commence à infuser une autre petite musique : attention à ne pas briser le socle commun constitué des macronistes et de LR. Les risques de la lenteurLa bataille Bercy-Grenelle se joue alors à fronts renversés : ce n’est pas le grand financier qui pousse aux économies et la responsable des affaires sociales aux concessions avec les syndicats, c’est l’inverse. Avec deux méthodes diamétralement opposées : une forte présence médiatique côté Lombard, une grande discrétion côté Vautrin. Le chef du gouvernement reste coi en public jusqu’à ce qu’il retrouve l’équilibre, et sa proposition de reprise du chantier lors de la DPG rejoint ses mots du premier jour, “reprendre sans suspendre” – sauf qu’il a gagné un peu de temps et embarrassé les socialistes, condamnés à exiger des précisions supplémentaires sur ses “engagements”.Gagner du temps, y compris avec la proportionnelle, pour laquelle François Bayrou ne donne aucun calendrier. Partisan de longue date de son introduction, il sait que le diable se cache dans les détails. Même ceux qui la souhaitent ne sont absolument pas d’accord sur les modalités, et les autres jugent le sujet tout sauf prioritaire.Rien ne sert de courir… En 2017, François Bayrou avait convaincu le candidat Emmanuel Macron de lancer une banque de la démocratie, que le président s’était empressé d’oublier. Sept ans plus tard, il reprend donc, là aussi, le chantier. “Hâtez-vous lentement et, sans perdre courage, Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage : Polissez-le sans cesse et le repolissez…”Quand Emmanuel Macron rechignait à nommer le maire de Pau à Matignon, il pointait les risques de la lenteur : “Je n’en veux pas, il ne fait rien !” Où se termine la patience, où commence l’immobilisme ? En écoutant François Bayrou, un ami du président a trouvé un début de réponse dans… Deux heures moins le quart avant Jésus-Christ, la comédie de Jean Yanne : “Nous ne pouvons rien faire pour le moment, mais dès que nous le pourrons, nous ferons le double.”



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Author : Eric Mandonnet

Publish date : 2025-01-14 19:29:00

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