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L’Express

Incendies à Los Angeles : la Californie bientôt invivable ?

Des pompiers combattent le feu à Los Angeles, le 8 janvier 2024




Quand une question revient régulièrement dans le débat, c’est qu’elle inquiète vraiment. Les médias américains s’en font eux-mêmes le relais depuis plusieurs années : la Californie devient-elle de moins en moins vivable ? Vaste sujet qui englobe des thématiques sociales, économiques… Mais surtout climatiques. Car cet Etat ensoleillé de l’ouest du pays, berceau de la tech, connu pour ses industries cinématographique et musicale, est actuellement ravagé par plusieurs feux toujours indomptés, qui ont fait au moins dix morts aux alentours de Los Angeles.Avec son climat méditerranéen et ses végétaux inflammables, la Californie n’en est pas à son premier incendie, loin de là. Mais le changement climatique exacerbe leur intensité et allonge la saison des feux. Leur fréquence a augmenté d’environ 25 % dans la région par rapport à l’ère préindustrielle, selon une étude parue dans Nature en 2023. Ce qui entraîne d’importantes pertes au niveau de la couverture forestière : plus de 700 000 hectares ont brûlé entre 2020 et 2021, d’après le Global Forest Watch. Soit plus de cinq fois la superficie d’une Los Angeles tentaculaire. Et la tendance sur les vingt dernières années est clairement à la hausse.Jusqu’à présent, la région connaissait ses pires incendies lors de la période estivale, entre juin et octobre. Mais des conditions extrêmes ont dopé ces feux hivernaux : des vents chauds, secs et puissants combinés à un couvert végétal luxuriant après deux années très pluvieuses, puis asséché par un manque chronique d’eau. “Los Angeles n’a reçu, depuis mai dernier, que cinq millimètres de pluie. On ne s’adapte pas au changement climatique, on le subit avec beaucoup de casse”, a sobrement commenté le climatologue Christophe Cassou.”Épidémie de janvier”Pour la Californie, le World Resources Institut évoque même une véritable “épidémie de janvier”. Selon ses données, 40 fois plus d’alertes au feu ont été détectées à date du 9 janvier 2025 par rapport aux deux premières semaines de l’année entre 2012 et 2024. “La plupart du temps, aucune alerte incendie n’est détectée à Los Angeles au cours des trois premiers mois de l’année, et encore moins au cours des deux premières semaines. Seule une autre année, 2021, a connu plus de 10 alertes incendie entre janvier et mars. Celle-ci est devenue l’une des plus dévastatrices de Californie en termes d’incendies de forêt”, rappelle le think tank américain.Côté températures, la dynamique n’est guère plus réjouissante. Elles ont augmenté de plus de deux degrés dans le sud de l’Etat depuis 1895. Dans sa stratégie d’adaptation au changement climatique, la Californie table sur des températures moyennes susceptibles d’augmenter de 2,4 °C d’ici à 2050, et, dans le pire des cas, de 4,9 °C à la fin du siècle.Un tout autre monde, qui pousse déjà certaines familles à plier bagage. Le mouvement n’a encore rien de massif. Et il reste avant tout régional. Dans un livre récent, le journaliste d’investigation américain Abrahm Lustgarten analyse les déplacements des 26 000 victimes des incendies de 2018 qui ont frappé le nord de la Californie. Les survivants se sont réinstallés principalement dans la partie centrale de l’Etat. Environ un quart sont même revenus pour reconstruire leurs maisons et leurs communautés, malgré les risques.Des migrations internesToutefois, certaines villes ont mal supporté l’afflux de ces réfugiés climatiques. Celle de Chico, qui a vu sa population augmenter de 15 % du jour au lendemain après l’incendie de 2018, a dû faire face à une augmentation de la pauvreté, des déchets, des eaux usées et des pénuries de logements au cours des deux années ayant suivi le drame. Le comté de Mendocino, situé à 270 kilomètres au nord de San Francisco, sera-t-il le prochain à servir de refuge aux Californiens stressés ? Les agences immobilières locales mettent déjà en avant son décor de carte postale et son risque climatique relativement modéré par rapport au reste du territoire.Mais la concurrence est rude. Chaque année, de nouveaux noms apparaissent dans la liste des dix villes les plus confortables pour vivre ou celle des plus dangereuses d’un point de vue climatique. Beaucoup de ces classements pêchent d’un point de vue méthodologique. Cela n’empêche pas certaines cités de tirer leur épingle du jeu. A l’image de Duluth, dans le Minnesota.L’endroit possède de nombreux atouts : des températures plutôt basses, des réserves d’eau abondantes – la ville borde le Lac supérieur -, beaucoup de place pour accueillir de nouveaux habitants, ce qui en fait déjà un lieu de destination privilégié des familles californiennes. Mais aussi celles provenant d’autres Etats confrontés, eux aussi, aux incendies, aux cyclones ou à l’érosion des côtes. Au cours des prochaines décennies, 20 millions d’Américains pourraient être contraints de changer d’adresse, annoncent déjà plusieurs experts outre-Atlantique. Si une migration de cette ampleur se produisait, elle éclipserait celle provoquée par la crise agricole et les bassins de poussière (dust bowl) dans les années 1930. De quoi véritablement changer le visage de l’Amérique.



Source link : https://www.lexpress.fr/environnement/incendies-a-los-angeles-la-californie-bientot-invivable-RTP6M74265HMBHNRLBGBK3JLUI/

Author : Sébastien Julian, Baptiste Langlois

Publish date : 2025-01-11 06:30:00

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