Une natalité en berne qui préoccupe Vladimir Poutine. La Russie s’inquiète d’une “situation démographique très tendue”, a affirmé ce vendredi 22 novembre le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, dans une interview relayée par l’agence d’Etat Ria Novosti. “Les migrants, c’est un besoin, a ajouté le responsable. Nous vivons dans le plus grand pays du monde, mais nous sommes peu nombreux.” Estimée à 143,8 millions d’habitants l’an dernier, la population russe connaît un recul important depuis les années 80. À l’époque, l’URSS comptait au moins 10 millions d’habitants supplémentaires, avant que le déclin du régime soviétique ne fasse poursuivre la tendance à la baisse jusqu’au début du nouveau millénaire.Un léger rebond de la natalité, puis une nouvelle diminutionMalgré un léger rebond jusqu’à la fin des années 2010, la diminution de la population s’est de nouveau accentuée ces dernières années. Surtout, les projections pour les prochaines décennies montrent que la Russie devrait connaître une réduction continue du nombre de ses habitants. D’après les projections du Département des affaires économiques et sociales de l’ONU, le pays pourrait perdre 15 % de ce chiffre d’ici à 2100, soit un peu moins de 20 millions d’habitants. Une perspective qui a de quoi faire frémir les autorités russes, tant l’enjeu démographique représente un défi majeur pour permettre à la Russie de continuer d’exister sur la scène internationale sur le long terme.”Pour que nous puissions nous développer de manière dynamique, réaliser tous les projets de développement, nous avons besoin d’une main-d’œuvre”, a ainsi expliqué Dmitri Peskov. Selon lui, les autorités russes ne peuvent donc que “saluer” l’arrivée de migrants dans le pays. En juillet, le Kremlin avait déjà reconnu une situation démographique “catastrophique pour l’avenir de la nation”. Dans l’objectif de remédier à cette crise, le Parlement russe a adopté le 12 novembre dernier une loi interdisant la promotion d’un mode de vie sans enfants. Ce texte prévoit de lourdes amendes pour toute personne qui se livrerait à des propos mettant en avant un tel projet de vie.La guerre en Ukraine, facteur aggravant de la baisse de la démographieLa réduction de la natalité est l’une des données les plus alarmantes pour la Russie. En 2023, le taux de fécondité était d’1,41 enfant par femme en âge de procréer, selon des estimations de l’agence russe des statistiques (Rosstat), citées par le quotidien économique RBC. Un chiffre éloigné du taux de renouvellement de la population, mais aussi des résultats dans certaines des autres régions du monde. Bien qu’en baisse, la natalité s’établissait en France l’an dernier à 1,64 enfant par femme. Aux Etats-Unis, elle a atteint 1,62 enfant par femme sur la même période. Pire encore pour la Russie : cette baisse du nombre de naissances poursuit sa chute ces derniers mois. Toujours d’après Rosstat, seuls 920 200 enfants sont nés entre janvier et septembre 2024, soit une baisse de 3,4 % par rapport à la même période de l’année précédente. Il s’agit là du pire bilan en la matière depuis la fin des années 90.Le conflit en Ukraine accroît la mauvaise dynamique démographique de la Russie. D’une part, une frange de la population a quitté la fédération après l’invasion du pays voisin par les troupes du Kremlin. Ils seraient au moins plusieurs centaines de milliers à avoir fui vers l’étranger, peut-être jusqu’à un million de personnes selon certaines projections, mais leur nombre est impossible à quantifier avec précision. Cette donnée représente en tant que tel un manque à combler démographique pour les autorités russes. De manière plus globale, le flou sur la suite du conflit peut réfréner les projets de fonder une famille de certains Russes, selon certains spécialistes. “La guerre dure depuis trois ans et touche désormais directement le territoire russe, indiquait mi-septembre le spécialiste en géopolitique à Bloomberg Alex Kokcharov, selon des propos rapportés par Euronews. L’argent n’est pas le seul facteur. La situation sécuritaire dans les régions frontalières étant incertaine, les familles repoussent leur décision d’avoir des enfants.”La volonté de Vladimir Poutine de relancer la natalité en Russie ne date toutefois pas du début du conflit ukrainien. Lors de son second mandat présidentiel, en 2006, il avait engagé une série de mesures pour tenter d’améliorer la situation, mettant par exemple en place une aide financière pour aider les parents d’un premier enfant. La baisse démographique constituait à l’époque le “problème le plus grave dans la Russie moderne”, avait-il affirmé, lors de son discours annuel à la nation. Le contexte international et économique en Russie n’était néanmoins pas le même qu’aujourd’hui. “Pendant que le pays fait face à une natalité en baisse, une population de plus en plus âgée, une haute mortalité des adultes et une infertilité tant chez les hommes que chez les femmes, la hausse limitée de l’immigration et la fuite des cerveaux qui se poursuit dans le pays place la Russie particulièrement à l’épreuve”, résumait ainsi le chercheur Harley Balzer cet été, dans une analyse publiée par l’Atlantic Council, un think tank américain.
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Publish date : 2024-11-22 15:09:12
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